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Anne Bourrel, auteur La Manufacture de livres

Buenos Aires, nuit, tango, catedral, taxi

11 Octobre 2019 , Rédigé par anne bourrel

 Hier soir, je suis retournée à la Catedral. Ce n'est pas la milonga la plus subtile, on y trouve pas mal de touristes et hier une jeune femme s'improvisait professeur d'un groupe ébahi alors qu'elle ne savait même pas marcher, glisser, sans faire de vagues...(pour les non danseurs: ça, c'est vraiment pas possible. Quand un danseur ou une danseuse a l'air d'un échassier ou d'un égyptien antique perdu au XXI siècle, ya problème. Ou bien c'est un débutant auquel cas, c'est largement pardonnable, ça va passer mais une enseignante de tango, non, ça , non, non, non. La dame avait été recrutée par erreur ou parce que justement: les touristes). Ça nous a fait un peu rigoler quand même et grincer des dents aussi, mais passons, passons, passons. La cathedral reste un lieu magique et qui continue de me faire rêver.  

Deux petits concerts dans la soirée et des retrouvailles avec Sebastian, danseur comme moi quasi débutant il y a deux ans. Retrouver un abrazo connu et se réjouir ensemble du chemin parcouru. Danser le tango, ce n'est pas simplement disfrutarse, s'amuser, c'est aussi aller à la rencontre de: soi-même, les autres, el Arte. Nous créons ensemble le temps d'un tour de piste, un petit monde complet, une vie entière, vécue en un seul souffle.

A la Catedral, les lumières sont belles. Le sol toujours un sujet, mais bien glissant cette année. La musique, c'est en live qu'elle s'apprécie le mieux: un premier concert dans la petite salle à damiers comme dans une page d'Alice, avec bandonéon frisson et guitare fluide et plus tard dans la grande salle, une chanteuse toute jeune qui a avalé cent ans de passion tanguera. J'adore. Au bras de Marcos qui aime danser salvaje et de Sébastian suave, le temps n'a de prise sur rien. On vole, pivote, s'envole...asi se baila el tango.

Dans le taxi de retour, hélé sur Corrientes, le chauffeur ne dit rien, les mains bien à plat sur le volant. J'aperçois la masse épaisse de ses cheveux blancs. Nous contemplons la ville, nous la regardons défiler, parée de toutes ses lumières et il n'y a presque personne dehors à cette heure avancée de la nuit. J'étais en train de penser combien elle était belle, la nuit, Buenos Aires mais c'est lui qui d'une belle voix ample et rauque le dit:

Que hermosa esta la cuidad. En el silencio de la noche esta mas tanguera.

Oui, belle et encore plus tanguera dans le silence de la nuit. Tanguera. Il a bien appuyé sur le dernier mot. Tanguera

Mon chauffeur de taxi en plus d'être poète est chanteur de tango. 

Dans le silence et la nuit de la ville tanguera, il a chanté quelques bribes de La Pasional et Malena aussi, Malena canta el tango con voz quebrada ...

Que lindas letras, que les paroles sont belles, et muy triste, muy triste...il a ajouté en admirant avec moi les gratte-ciels illuminés sur Cordoba.

Et c'est comme ça, dans le silence de la nuit, qu'on a oublié de prendre à droite, qu'on a continué longtemps, contemplatifs et plein du silence du tango. Il a bien fallu revenir à la réalité, on n'allait quand même pas rouler comme ça jusqu'au fleuve...

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